Histoire de PONT DE BEAUVOISIN de l'an 1700 à 1800.

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En 1700, au commencement du XVIII siècle, peut-être même avant, une compagnie d'infanterie formait la garnison plus ou moins sédentaire de la ville. Le capitaine commandant avait alors le titre de major simplement.

Mais vers 1719, un office de "commandant de place" y fut créé, par ordre du Duc d'Orléans, avec une lieutenance de Roi en sous-ordre. Le premier titulaire de cet emploi nouveau fut le sieur de Villeneuve qui eut de violents démêlés avec les fermiers des douanes. Le mémoire suivant, écrit vers 1730, nous fait connaître les griefs reprochés au nouveau commandant ; (Mémoire par lequel il est prouvé que l'établissement d'un commandant de place pour le Roy au Pont-de-Beauvoisin est très préjudiciable aux fermes). C'est une nouveauté qu'un commandant au Pont-de-Beauvoisin, mais sa Majesté ayant jugé à propos d'en établir un, choisit S. de Villeneuve et l'y envoya en 1719. Il y avait en ce temps une compagnie du régiment de Lorraine en garnison qui n'y resta pas longtemps et qui fut relevée par une autre compagnie de Navarre qui y séjourna trois au quatre mois au plus. Lorsque cette petite troupe se fut retirée, le sieur de Villeneuve qui avait goûté la douceur du commandement et qui ne voyait personne pour obéir, à ses ordres, prit le parti de tenir des espèces de milices qu'il choisit parmi les habitants du lieu et des environs et faisait faire la garde sur le pont qui sépare la France de la Savoie.

La contrebande régnait alors et ses habitants, qui en font une profession ouverte, choisissaient le temps favorable que leurs amis fussent de garde pour faire passer leurs marchandises. Le commis principal des fermes représenta au rieur Villeneuve les dangereuses suites de cette garde et, de concert, ils écrivirent, luy à M. Blanc, le commis principal à M. Fagon, qu'il était du bien du service de poser une barrière sur le Pont-de-Beauvoisin pour empêcher ce versement des marchandises. On rendit cette année un arrêt par lequel il fut ordonné que cette barrière serait construite aux frais du fermier qui a toujours prétendu que la clef devait être à ses commis. Le Sieur de Villeneuve s'en saisit injustement et la garda fort longtemps, mais forcé de se rendre aux représentations du contrôleur général des fermes qui succéda au commis principal qui lui fit connaître l'abus qui en résultait par l'interruption du commerce et par la confiance mal fondée qu'on avait aux habitants du dit-lieu qui faisaient toujours la garde, il convint qu'elle serait mieux entre les mains des employés et la remit aux garde sédentaire du bureau. Pendant le temps qu'elle a été à leur disposition , le service des fermes s'est mieux fait et il ne s'est rien passé d'extraordinaire. Le sieur de Villeneuve, étant sans troupes, considéra qu'il était inutile en ce lieu et voulant s'y rendre recommandable, sollicita en Cour une compagnie "d'invalides" sous prétexte de garder une frontière, comme si elle était exposée aux insultes de l'ennemi et en faire pour la première fois de la vie une place de guerre. (Ceci est absolument faux, nous l'avons déjà fait remarqué). Cette compagnie obtenue, il demanda aux gardes sédentaires la clef de la barrière pour deux heures seulement ; elle lui fut remise, et quelques jours après en vain réclamée par le contrôleur général des fermes; il n'a jamais voulu s'en dessaisir, en sorte que toutes les marchandises venant d'Italie et de Savoie et toutes celles qui y vont sont d'abord à la disposition du commandant et de ses troupes avant que d'être en celles des commis et employés du bureau qui seuls doivent y être préposés. La peste qui est survenue a autorisé ce commandant dans ces sortes de fonctions par les différents ordres qu'il a reçus de MM. les Commandant et Intendant de cette province qui lui ont enjoint de prendre garde à ce qui entrerait et sortirait pour la sûreté et la santé ; il s'est luy même presté et fait valoir en exposant qu'il en serait le salut et la garantirait par ses soins de la maladie. Il a aussi écrit à M. le Prévost des marchands et à MM. de la chambre de la Santé de Lyon qu'ils ne devaient recevoir comme marchandises venant de ce costé qu'elles ne fussent accompagnées d'un billet de santé visé de Luy, comme si tout ce qui sortait de Savoye avait été censé infesté ; néanmoins la terreur et l'effroy que cause la peste le fit écouter, sans réfléchir s'il était nécessaire, ou s'il ne l'était pas, en un mot, il se rendit maître de tout. Ceux qui sont préposés à la régie des fermes se sont plaints quelques fois que ce commandant s'immisçoit mal à propos dans leurs affaires, qu'elles n'étaient point de sa compétence, que ses troupes tracassaient les voituriers et les faisaient composer, qu'elles empêchaient le versement du sel de Dauphine en Savoye et que si celuy des marchandises défendues en France avait lieu, elles le faciliteraient, que lui-même exigeait induement dix sols par billet de santé qui accompagnait chaque ballot et marchandises venant d'Italie ou de Savoye pour Lyon ; que ces dix sols excédaient quelques fois les droits des fermes. M. de Medavy lui donna ordre à différentes fois de ne point se mêler d'affaires de fermes et lui écrivit aussi de ne rien exiger pour son veu (visa) des billets de santé, comme on le verra par la copie de la lettre ci-jointe. (Signé Cretel, 5 juin 1721, lettre-reçu d'un acquit de 10 sols HPB.)

En 1729-1732, d'après le plan cadastral du géomètre Charles Antoine Bucaillon, et d'après la carte de Cocelli, la ville compte, sur la rive droite, 422 parcelles pour 568 journaux, 66 toises ; la dîme est payée au prieur des carmes de Pont de Beauvoisin ; les droits féodaux sont dus au Carmes, au chapitre cathédral de Belley, à Joseph de Corbeau, seigneur de Vaulserre, au Marquis de Saint-Séverin. Il y a des biens communaux, mais pas de droits d'alpéage, ni d'affouage.

En 1747, naît à Pont-de-Beauvoisin, Cretel Emmanuel Comte de Champenol, administrateur, député de la Côte d'Or, membre des Cinq Cents sous le Directoire, du Conseil d'Etat sous le Consulat, directeur général des Ponts et Chaussées, gouverneur de la Banque de France en 1807, ministre de l'intérieur sous l'Empire. Il mourut Comte d'Empire en 1809. Il fut inhumé au Panthéon. (DS 1925)

En 1750, le château de Montbel a survécu à la puissance de ses suzerains ; longtemps encore ses débris orgueilleux resteraient debout. Ils fournirent un refuge aux bandits Mandrin et Roqueyrol. Au nord-ouest d'aperçois des vielles, derniers vestiges du château de Saint-Maurice-de Rotherens, dont les Barons eurent avec les Montbel de sanglantes et de nombreuses affaires. Voici à ce sujet quelques renseignements sur Mandrin et son état-major : traqués de partout, principalement à Genève et à Carouge, ils se sont décidés brusquement à venir occuper la Savoie, où les libertés étaient plus grandes et les contrebandiers plus nombreux. Ils vinrent s'établir au château de Rochefort. Ces hommes prévoyants mirent d'abord leurs fortunes en lieux sûrs ; 80 fusils appartenant aux contrebandiers furent également déposés au Pont-de-Beauvoisin, chez le nommé Provensac, dit le Français. Un marchand, M. Cretet, surveillait ces armes, conseillait et avertissait du danger les contrebandiers. Voici le rapport qui fut fait à la police par le sieur Marsin : Mandrin a à lui environ 100.000 livres (plus de 400.000 francs) ; son argent est en partie chez le marquis de Chaumont, en partie chez le marquis de Saint-Séverin, qui demeure au Pont-de-Beauvoisin, et en partie au Viviers, chez le nommé Recoquillé. Le nommé Berthier est, pour le moins aussi riche, mais on ne sait où il tient son argent. Le major, dit Saint-Pierre, peut avoir environ 25.000 livres qu'il tient aux Echelles, chez ses parents. Son frère cadet n'a guère qu'environ une centaine de louis. (Pélissard, dit le pays, est aussi riche que Mandrin et Berthier. Il tient son argent au Pont-de-Beauvoisin, chez M. Cretet, ou chez le nommé Mistrallet. Son frère, qui sert d'espion à toute la bande et que j'ai dit s'appeler Clément et faire le métier d'opérateur en France, a environ 12.000 livres, qu'il tient chez un prêtre à Saint-Jean de Maurienne. Broc a environ 30.000 livres qu'il garde chez lui, aux Echelles, où il est marié et tient boutique ouverte ; le nommé Carnaval a environ 20.000 livres, qu'il tient en dépôt chez des marchands de Chambéry. Tous ces individus sont les principaux chefs de bandes des contrebandiers. (Rajon)

En 1755, Monsieur de la Morlière recevait des avis de ses espions. Il écrivait du Pont-de-Beauvoisin à M. de Sinsan, gouverneur de Chambéry: Je crois, Monsieur, vous faire plaisir en vous donnant avis que ce soir Mandrin et plusieurs autres de sa bande doivent se trouver, sur les 9 à 10 heures du soir, au château de Domessin, appartenant à M. Lessins, pour y danser et se réjouir à l'occasion de la noce de la jeunesse, fermier du château, qui s'est marié aujourd'hui. Il serait heureux, Monsieur, que cette fête vous donnât lieu de débarrasser la société de ces mauvais sujets qui contrarient également l'autorité des deux monarques. C'est dans cette espérance que je vous fais passer cet avis. Si vous le voulez, Monsieur, envoyer secrètement à ce château, vous y ferez sûrement arrêter ce chef de bande, ainsi que plusieurs autres de sa suite. M. de Sinsan ne tint aucun compte de cet avis; le rapport du sieur Marsin nous a suffisamment édifiés sur la tolérance du gouvernement sarde à l'égard des contrebandiers. Il n'y avait donc rien à attendre de ce côté. Quels ordres furent alors donnés par les ministres de France ou les fermiers-généraux ? On ne sait. Des recherches dans les papiers de la Ferme, conservés aux archives nationale, jetteraient peut-être quelque lumière sur toute cette affaire. Une forte récompense avait dû être promise à celui qui s'emparerait de Mandrin ; en effet, on ne peut guère comprendre autrement que M. de La Morlière, simple colonel, ait osé sans ordres supérieurs, sans être assuré de l'impunité, au risque de provoquer de graves difficultés internationales, entreprendre le coup de main que nous allons lui voir exécuter. Un jour il reçut l'avis que Mandrin devait coucher dans la nuit du 10 au 11 mai 1755, au château de Rochefort, distant d'une lieue environ de la frontière. Ce château appartenait alors à M. de Piolène de Thoury, président au parlement de Grenoble, qui le tenait de sa femme Jeanne des Champs de Chaumont. Le sieur Marsin nous a appris que c'était le séjour ordinaire de Mandrin et que, soit à cause de l'hospitalité qu'il y recevait, soit pour autres motifs, il y avait pris le nom de "Thoury" pour mot de passe. Il y était très lié avec le fermier Joseph Perréti. D'après une légende, son arrivée dans la nuit du 10 au 11 mai aurait été dénoncée par une femme qui l'aimait, pour se venger de quelque trahison amoureuse. Rien dans les enquêtes officielles ne laisse soupçonner un fait de ce genre. A la réception de cet avis, M. de la Morlière prit immédiatement ses dispositions pour enlever Mandrin. Il choisit dans son régiment quelques officiers entreprenants et peu scrupuleux, dont on a conservé les noms. C'étaient le lieutenant-colonel de Carré commandant l'expédition ; les capitaines Champagnac, Boissonnet et le Chevalier de la Morlière, neveu du colonel ; le sous-lieutenant Duverger ; l'enseigne Durant et l'aide-major de Saint-Amour. Il leur donna quatre cents hommes et une centaine d'employés de la Ferme. Cette troupe se rendit à Romagnieu au milieu de la nuit. Là une quarantaine de soldats quittèrent leur uniforme pour se déguiser et peut-être pour ne pas le compromettre dans la besogne qu'ils allaient faire. A l'aube ils traversèrent la rivière de Guiers et se trouvèrent en Savoie. Le ciel était couvert, la nuit très sombre et comme il le fallait pour une telle expédition. La troupe, marchant en silence et sans suivre les chemins, se dirigea en droite ligne à travers les champs cultivés. Arrivés à Rochefort, le château fut brusquement investi et, pendant que les uns attaquaient la porte d'entrée pour la forcer, les autres se mirent à tirer des coups de fusils contre les fenêtres, afin d'effrayer et prévenir toute tentative d'évasion. Derrière la porte ils trouvèrent un garçon jardinier; ils le rouèrent de coups et fouillèrent ses poches. Le pauvre homme n'y avait qu'un couteau et une serpette ; on les lui prit. C'est lui qui indiqua l'endroit où se trouvait Mandrin. Il était couché avec un de ses compagnons, d'Huet de Saint-Pierre, d'une famille noble des Echelles, à l'extrémité de l'appartement du premier étage, dans une petite chambre qui est à l'angle de la cour d'entrée. Des soldats et quelques officiers s'élancèrent dans l'escalier pour s'emparer de lui. Mandrin avait été réveillé par le bruit de la fusillade et il comprit que c'était à lui qu'on en voulait. Mais, en circonstance, il parait qu'il perdit la tête et démentit sa réputation d'audace et de bravoure. Dans la chambre, sur une table, étaient une paire de pistolets à deux coups, un sabre et un fusil, qui lui auraient permis de vendre chèrement sa vie. Il ne songea pas à s'en servir. Il passa ses souliers et ses culottes et, laissant son compagnon se tirer d'affaire comme il pourrait, il se sauva dans un galetas situé au-dessus de sa chambre et s'y cacha sous un tas de sarments. On se saisit de lui sans qu'il opposât, pas plus que son ami Saint-Pierre, la moindre résistance : ils furent solidement garrottés avec des cordes. Pendant que s'opérait cette capture, les soldats enfoncèrent la porte du fermier, qui fut battu et blessé grièvement. Ils fouillèrent dans tous les coins et recoins : les hardes, linge, souliers, en un mot, tout ce qui leur parut bon à prendre, fut volé. Ils arrachèrent la croix d'or du cou de sa femme et lui prirent le peu d'argent qu'elle avait dans ses poches. En furetant, ils trouvèrent 147 louis d'or, montant de deux années de fermages et caché sous un prie-Dieu, un petit sac à procès presque à moitié plein de doubles louis d'or que Mandrin avait donné en garde au fermier. Le lieutenant-colonel de Carré mit le tout dans sa poche. Puisque le chef en donnait l'exemple, la soldatesque mit réellement le château au pillage. Toutes les portes des chambres furent enfoncées et brisées : les meubles, secrétaires, commodes et garde-robes furent aussi fracturés, tout ce qui s'y trouvait mis en paquets et emporté : les archives furent lacérées et jetées par les fenêtres. Quand il n'y eut plus rien à prendre, quelques-uns allèrent jusqu'à couper des pans des tapisseries qui couvraient les murailles. Quand ces scènes de brigandage furent terminées, M. de Carré se mit en devoir de repasser la frontière. Il assembla ses hommes. Mit au milieu d'eux, sur la charrette, Mandrin et Saint-Pierre et deux ou trois pauvres diables arrêtés et qui furent ensuite relâchés. Il était alors près de dix heures du matin. En passant à Avressieux, cette soldatesque avinée, tua à coups de baïonnettes, sans motifs apparents, le maître d'école et pilla sa maison. Quelques paysans attirés par le bruit étant sortis de chez eux pour voir ce qui se passait furent accueillis à coups de fusils ; à Saint-Genix les mêmes désordres se renouvelèrent. Plusieurs maisons et des boutiques de marchands furent complètement dévalisées. Les pillards répandirent la terreur dans ce petit endroit en tirant des coups de fusils de tous côtés : un homme y fut tué et plusieurs blessés. Les habitants cherchèrent une salle dans l'église, on les y poursuivit à coups de baïonnettes. C'est apparemment cette fusillade qui a fait croire à quelques bibliographies de Mandrin qu'il y avait eu là un mouvement populaire pour le délivrer. Enfin, la troupe repassa le Guiers. Le colonel de la Morlière attendait sur le rivage les résultats de l'expédition. Quand il eut connaissance de l'arrestation de Mandrin, il partit immédiatement en poste pour l'annoncer à Paris et probablement recevoir la récompense promise. Quant aux deux prisonniers, ils furent dirigés sur Valence sous la garde d'une cinquantaine de soldats et condamnés à être rompus vifs. L'exécution eut lieu les 26 et 27 mai 1755. La veille, MANDRIN répondit à une dame qui lui parlait de confession et de salut : "Combien y a-t-il de cabarets d'ici au paradis, car je n'ai que six livres à dépenser sur la route". (Rajon)

En 1771, une cérémonie se déroule, lors du passage à Pont-de-Beauvoisin de la fille de Victor Amédée III, Marie-Joséphine, qui allait épouser le Comte de Provence, le futur Louis XVIII comme en 1773 pour la soeur Marie-Thérèse destinée au Comte D'Artois (futution civile, mai sur Charles X). (H)

En 1775, Marie-Clotilde-Adélaïde Xavier, fille du Dauphin Louis de France, fut reçue au Pont-de-Beauvoisin par son fiancé, le futur Charles Emmanuel IV. Pendant six mois, une armée de peintres avait transformé en palais les maisons autour de l'église des Carmes, de longues galeries somptueusement décorées permirent à la princesse de passer de France en Savoie à couvert, comme si elle changeait de pièce. Pendant une semaine, ce fut une suite d'illuminations, de feux d'artifice, de cavalcades, de festins. Marie-Clotilde préférait cependant les promenades avec son fiancé dans les environs, ou s'occuper des pauvres du pays. (HPP)

En 1791, les tantes de Marie-Clotilde, Melles Victoire et Adélaïde de France, fuyant la révolution naissante, arrivent au Pont-de-Beauvoisin rive gauche sous les cris et les huées de la foule. Les deux vieilles filles ne se sentirent rassurées qu'une fois le pont franchi, car sur la rive droite une réception digne de leur rang les attendait. (HPP) En février 1791, en pleine révolution, le curé de Pont-de-Beauvoisin et ses vicaires reçurent l'ordre de prêter serment à la constitution civile du clergé. Le curé Pravaz, en chaire, prononça ces paroles : "nous sommes disposés à prêter serment à la constitution civile, mais seulement en ce qui concerne la nation, la loi et le Roi. Ce qui a été réglé par l'Assemblée, relativement au clergé, doit être soumis à l'Eglise. Que l'Eglise décide et nous obéirons à l'Eglise. Invité à prêter un nouveau serment conformément aux prescriptions de l'Assemblée Nationale, il s'y refusa, passa en Savoie et fut remplacé par le curé Douillet, fondateur et président de la Société Populaire "les amis de constitution" de Pont-de-Beauvoisin. Le 20 avril 1792, le ministère fit voter par l'assemblée la déclaration de guerre à l'Autriche. Cette guerre débuta mal et les troubles religieux s'aggravèrent. Le 17 mai 1792, la Société Populaire de Pont-de-Beauvoisin fut créée. Les créateurs "considérant que dans un moment où les ennemis de la patrie s'agitent de mille manières pour égarer des citoyens crédules par des suggestions perfides, semer la défiance parmi eux, prêcher la désobéissance aux bois, il est du devoir des vrais citoyens français de déjouer les projets de ces vils instigateurs en éclairant le peuple sur ses droits et ses devoirs, en lui faisant ressentir les bienfaits de la constitution. Considérant que le plus sûr moyen de parvenir à ce but est la réunion de corps et d'âmes de tous les vrais patriotes, intimement persuadés que l'union est une force invincible contre laquelle se viendront rompre les sourdes menées des conspirateurs, ont arrêté de se former en Société d'Amis de la Constitution et de s'assembler provisoirement les jeudi et dimanche de chaque semaine afin de veiller à l'exécution des lois et de propager les principes de liberté". Le règlement de la société, adopté le 10 juin suivant comprenait 30 articles : L'article 2 disait : "l'objet de la Société est : 1) de s'occuper de tout ce qui peut intéresser la liberté, tendre à l'utilité générale et spécialement à propager le patriotisme. 2) de se pénétrer des principes qui auront dirigé les décrets de l'Assemblée Nationale. 3) de travailler de tout son pouvoir à l'affermissement de la Constitution. L'article 10 prévoit des sanctions contre les membres convaincus d'avoir manifesté verbalement ou par écrit, des principes contraires à la Constitution et aux Droits de l'Homme. Cette Société avait ses comités de rapports et de surveillance. Le comité de rapports était chargé de la correspondance avec les autres sociétés populaires et avec le Comité de Salut Public. Il ne craignait pas de s'adresser à l'accusateur public pour lui désigner les personnes à guillotiner. Le comité de surveillance était chargé des enquêtes et dénonciations. La société fit d'abord preuve de modération vis à vis des prêtres insermentés, disant que "les principes d'un gouvernement avaient pour but la tolérance la plus parfaite et la liberté entière des cultes ; qu'en conséquence, il fallait plaindre l'égarement de nos frères fanatisés tant qu'ils ne troublaient pas l'ordre public, mais surveiller de la manière la plus active la conduite de ces prêtres réfractaires et pervers et s'assurer de l'exécution des lois de rigueur que les autorités constituée s'étaient obligées de leur signifier". Le 20 juin 1792, en apprenant la prochaine arrivée de l'armée prussienne, la patrie fut déclarée en danger ; une levée générale de volontaires, la réquisition des armes et munitions et la mise en état "d'activité permanente des gardes nationaux" furent ordonnées ; le 23 juillet 1792, une altercation avec coups de feu se produit à Pont-de-Beauvoisin, entre soldats français et sardes; Le commandant sarde fait retirer ses troupes sur les Echelles et le 22 septembre, le Général Montesquiou envahit la Savoie ; le 24 juillet, une dame venant de Chambéry sans passeport est arrêtée à la Tour du Pin, le 8 août l'ordre est donné d'arrêter un officier de dragons, passé le 7 à Chambéry, revenu le même jour au Pont-de-Beauvoisin qui s'est fait conduire à Saint-Genix et qui veut revenir à Vienne. Pour satisfaire à la réquisition des armes et munitions, chaque particulier dut faire sa déclaration d'armes dans le délai de huit jours. Le 24 février 1793, un membre de la Société Populaire de Pont-de-Beauvoisin proposait de faire disparaître les Fleurs de Lys sur les boutons des vétérans, (Ces emblèmes étant devenus un objet d'horreur pour les vrais républicains) ; en même temps était demandée la destruction du monument fastueux et insolent élevé dans le passage de la grotte (les Echelles), au roitelet de Sardaigne par ses serviles courtisans et, en effet, l'inscription latine en l'honneur de Charles-Emmanuel III fut mutilée par de "braves républicains qui avaient déjà terrassé les armées des despotes". Egalement, les armes des Rois de France gravées sur l'une des pierres-limites du Pont François 1er, à Pont-de-Beauvoisin, furent biffées et les Fleurs de Lys grossièrement transformées en roses. Le 20 mai 1793, un arbre de la liberté fut planté à Pont-de-Beauvoisin, pour la prestation de serment de la nouvelle constitution ; peu après, cet arbre dut être remplacé par un autre plus jeune sur lequel on fit placer, à dix ou douze pieds de hauteur : "les Français ont une patrie" et sur l'oriflamme qui devait y flotter, les mots: "Egalité, Liberté, République une et indivisible".

En 1794, on s'est souvent demandé si les deux Pont-de-Beauvoisin ne pourraient pas être réunis en une seule localité ; nos ancêtres y ont pensé avant, le 21 vendémiaire an 111 (14 octobre), les habitants du Pont (Isère) firent une pétition pour annexer à eux le Point (Savoie), en voici la forme et le sort qu'elle eut, depuis il n'en n'a plus été question : le 14 octobre 1794, le Conseil municipal de la commune de Pont (Isère) adressa une pétition au représentant du Gauthier, pour lui demander la réunion de la commune (Savoie) à celle de Pont (Isère), pour ne former plus qu'une commune qui dépendrait du district de la Tour du Pin. Le Conseil de la commune du Pont (Savoie) représenta avec beaucoup d'insistance que cette commune n'était qu'à six lieues de Chambéry, tandis qu'elle se trouvait à neuf de Grenoble ; que toutes les relations d'habitudes et de commerce étaient avec Chambéry, et que la population locale ne verrait ce changement qu'avec une extrême répugnance. Le Conseil général du département pris ces raisons en considération et engagea le représentant du peuple à rejeter la demande ; ce qui fut fait. (Rajon)

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